À l’occasion des 16 jours d’activisme contre les violences basées sur le genre, la Société des Gynécologues et Obstétriciens du Cameroun (SOGOC) a réuni le 1er Décembre dernier à Yaoundé, des experts venus renforcer la réflexion nationale sur les lois relatives à la santé sexuelle et reproductive (SRHR). Une rencontre stratégique qui ambitionne de redéfinir l’approche camerounaise face aux violences faites aux femmes, en particulier celles liées aux grossesses non désirées et aux avortements non sécurisés.

Un regard juridique essentiel pour comprendre les enjeux africains
Pour structurer les échanges, le SOGOC a convié le Magistrat Fernand Fonkui, du Ministère de la Justice. L’expert a passé en revue les principaux cadres juridiques africains en matière de santé reproductive, notamment les conventions internationales ratifiées par le Cameroun :
- CEDAW,
- Convention relative aux droits des personnes handicapées,
- Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels,
- et surtout le Protocole de Maputo.
Bien que le Cameroun ait ratifié ce protocole sans réserve, le pays avait émis une déclaration interprétative précisant que son adhésion «ne saurait être interprétée comme la promotion de l’avortement, sauf pour raisons thérapeutiques». Une nuance qui, selon les experts, pose un défi majeur à la protection effective de la santé des femmes.

Des exemples africains
Les analyses ont mis en lumière une évidence visible. Le Cameroun accuse un retard important dans l’adoption d’une législation complète sur la santé reproductive. Des pays comme le Bénin, le Sénégal, le Tchad, le Niger, le Rwanda ou encore la Guinée ont déjà adopté des lois progressistes offrant un meilleur encadrement, une protection renforcée des femmes et un accès sécurisé aux soins.
Pour le Magistrat Fonkui, avant de rédiger une loi nationale sur la santé reproductive, le Cameroun doit s’inspirer de ces modèles africains, afin d’élaborer un cadre juridique adapté à ses réalités sociales, sanitaires et culturelles.

Vers une loi camerounaise sur la santé reproductive ?
Un avant-projet de loi a été présenté, structuré autour de plusieurs axes :
- Principes généraux et définitions clés ;
- Droits et obligations de l’État, des institutions, des acteurs non étatiques et des citoyens ;
- Organisation des structures de santé reproductive et régulation de leurs services ;
- Qualifications et responsabilités des personnels ;
- Dispositions pénales, notamment en matière de pratiques dangereuses ou de violation des droits reproductifs.
Il s’agit là d’une base solide pour redynamiser l’action législative autour de la santé reproductive au Cameroun.

L’appel du SOGOC
Au nom du SOGOC, Dr. Anny Ngassam, Secrétaire Générale Adjointe, a salué la pertinence de la présentation avant de rappeler une réalité glaçante. 25 % des décès maternels au Cameroun sont liés aux avortements non sécurisés, souvent issus de grossesses non désirées provoquées par des violences, notamment le viol.
Dans une interview accordée à notre rédaction, elle précise que :
«La femme a droit à la santé comme à l’éducation et notamment la santé de la reproduction. Il y a plein de questions sur lesquelles les femmes ne sont pas autonomes : les questions de planning familial, questions d’accès aux soins et les questions sur l’avortement (…) Nous ne voulons pas vulgariser l’avortement, nous voulons lutter contre la mortalité maternelle et les statistiques montrent qu’une femme sur trois décède à cause des complications liées à l’avortement non sécurisé.»
Un message sans ambiguïté, qui invite à repenser les outils de protection, de prévention et de prise en charge.

Un engagement renouvelé pour les 16 jours d’activisme
Dans le cadre de la campagne 16 Jours d’Activisme contre les violences basées sur le genre, placée cette année sous le thème : «Mettre fin aux violences numériques faites aux femmes et aux filles», le SOGOG CAMEROON est de plein pied dans la sensibilisation à travers ses différentes activités visant à attirer l’attention sur l’explosion des violences faites aux femmes, particulièrement celles qui mènent à des grossesses forcées et à des avortements clandestins, et renforcer le plaidoyer pour des soins complets d’avortement sécurisés dans les cas admissibles.










